Talaiou El Houriyet de Benflis : y a-t-il un malaise interne ?

Talaiou El Houriyet de Benflis : y a-t-il un malaise interne ?

C’est encore des défections au sein du parti de Benflis, Talaiou el Houriyet (Avant-garde des Libertés). Une saignée qui a commencé au début de l’année, et qui semble bien donner des inquiétudes quant à l’exercice démocratique au sein des partis politiques.

En fait, il existe partout des démissions ou des « départs », voire des grognes et des « divorces » dans tous les partis politiques, comme cela se passe FLN, du RND ou El Islah.

C’est devenu une caractéristique et une tradition bien établie dans le paysage politique national et dans les pratiques partisanes. Mais, le plus grave, c’est cette « tare » qui touche des partis naissants, comme l’AGL, dont le président est un ancien chef du gouvernement, un ancien responsable de FLN et surtout un candidat à la présidentielles.

Selon les dernières nouvelle, la coordination du parti de la commune de Bejaia aurait enregistré la défection de 55 militants et cadres qui ont décidé de claquer la porte. Un mécontentement qui a pour origine la manière dont est géré le parti localement, alors que les élections législatives et municipales pointent à l’horizon.

Selon nos informations, les démissionnaires reprochent au coordinateur de la wilaya désigné par Benflis, et non élu par la base, d’agir « unilatéralement », sans respecter les règles démocratiques et le règlement intérieur.

Ce coordinateur, bombardé chef local du parti, s’est permis, selon les termes de leur déclaration, de « congédier un responsable communal légitiment et démocratiquement élu par la base militante ». Pour les pétitionnaires, la direction du parti observe le mutisme par tous les dépassements sans agir ».

Pour ces cadres mécontents, ce sont les anciennes pratiques révolues qui sont la cause de ces clivages et surtout la « perpétuation » des mentalités autoritaires. D’autres bureaux locaux de ce parti dans cette wilaya pourraient connaître des défections.

Des défections qui s’ajoutent aux démissions d’il y a quelques mois, notamment au sein du comité central, où une dizaine de membres, en majorité des jeunes, ont rendu le tablier. C’était lors de la deuxième session du CC de l’Avant-garde des Libertés. Les raisons invoquées sont les mêmes : le « mépris et le népotisme » pratiqué par ce parti, pour reprendre les termes propres des mécontents.

En décembre 2015, Aissa Bennacer et Rabah Hamoudi, deux membres fondateurs du parti, annoncent avec fracas leur démission à Constantine, suivis par 142 adhérents structurés au sein du bureau local de Zighoud-Youcef.

Dans leur communiqué, ils expliquent ces départs massifs par des « pratiques politiques en totale contradiction avec la vision initiale du parti, la mise à l’écart des véritables militants ou encore la prise de décisions iniques ».

D’autres échos nous parviennent sur le malaise qui caractérise un grand nombre de bureaux locaux et régionaux.

Des échos qui semblent aujourd’hui toucher les instances supérieures du parti, en raison du changement subit du discours de Benflis à l’égard du pouvoir.

Alors que Benflis, son président, s’est efforcé depuis 2014 de tenir un langage dur et radical, basé sur « la vacance du pouvoir » et sur « l’incompétence du gouvernement » et les « périls qui pèsent sur le pays en cas du maintien du système », il semble qu’aujourd’hui, il n’emprunte plus les mêmes termes, ni les mêmes idées.

Pour rappel, Benflis a toujours considéré le quatrième mandat de Bouteflika comme « illégitime », développant un discours d’opposition et une analyse idéologique sur ce substrat. C’est d’ailleurs sous ces prétextes qu’il expliqua la naissance de son parti.

Mais, aux dires des observateurs, beaucoup d’eau a coulé sous les ponts. Benflis s’est-il assagi ? A-t-il reconnu quelque part que sa démarche n’a aucune chance d’aboutir ? Qu’est-ce qui a changé pour que Benflis change de ton, comme l’ont remarqué des observateurs dans son dernier communiqué à l’occasion de l’anniversaire du 1er novembre 1954 ?

Prépare-t-il ses cadres à l’annonce en janvier prochain de sa participation aux élections législatives, alors qu’il clame depuis toujours que le vote en Algérie est entaché de « fraude massive » et « fausse » la réalité politique et sociale du pays ?

Cependant, à défaut de parler de crise organique, certains pensent que le mouvement de Benflis traîne les maladies « héréditaires » de la praxis politique en Algérie, comme la rupture des liens entre la direction d’Alger et ses organes locaux de la base, pour ne pas dire la mise à l’écart des structures intermédiaires et régionales dans la confection des décisions politiques.

De même, ce parti agréé en septembre 2015, perpétue des pratiques issues du parti unique, d’autant que la majorité de ses adhérents sont issus du FLN ou ont fait un passage au sein de ce parti.

Des pratiques qui vont du népotisme dans le choix et la désignation des responsables au blocage du débat libre et démocratique interne. Pourtant, eux-mêmes disent avoir été victimes de ces pratiques et s’efforcent de combattre ces maux. Le problème, c’est que Benflis lui-même ne reconnaît pas qu’il existe une crise ou un malaise interne, car il estime que les démissionnaires sont « libres dans leurs choix », « libres de partir ou de rester ».