Le théâtre d’Oran rend hommage à Abdelkader Alloula / «Arlequin, serviteur de deux maîtres» : devoir de mémoire et résonnance d’aujourd’hui

Le théâtre d’Oran rend hommage à Abdelkader Alloula  / «Arlequin, serviteur de deux maîtres» : devoir de mémoire et résonnance d’aujourd’hui

Khedija Arras

Le Théâtre régional d’Oran (TRO) a affiché salle archicomble, samedi dernier, à l’occasion de la représentation de la pièce «Arlequin, valet de deux maîtres », présentée en hommage au dramaturge Abdelkader Alloula en commémoration de la 25e année de sa disparition.

Cette production est le fruit d’un partenariat entre le TRO et le Théâtre national d’Alger Mahieddine-Bachtarzi (TNA) en hommage à Alloula qui réalisa la première version algérienne en 1993, une œuvre majeure de la commedia dell’arte du dramaturge Carlo Goldoni. Le public a pris plaisir à revisiter cette comédie dans sa version rafraîchie, mise en scène par Ziani Cherif Ayad d’après l’adaptation de Mohamed Bourahla, basée sur le texte d’Alloula, rapporte l’APS.

Ajoutant que l’assistance «a été captivée de bout en bout par les imbroglios, quiproquos et autres scènes comiques interprétés avec brio par de jeunes espoirs du théâtre national aux côtés de leur aîné Mohamed Himour, unique membre de la troupe à avoir joué dans la première version d’Alloula». L’histoire a pour trame des négociations dans la demeure d’un riche  marchand, nommé Pantalon (campé par Himour), qui s’apprête à marier sa fille  Clarisse (Amina Belhocine) à Silvio (Mohamed El Amine Rara) le fils du docteur Lombardi (Mahfoudh El Hani). C’est alors qu’intervient Arlequin (Mustapha Meratia) qui annonce la venue  de l’ancien fiancé de Clarisse que tout le monde croyait mort.

Notons que dans un contexte  de manifestations citoyennes et populaires, où  de nombreuses activités culturelles ont été reportées à des dates ultérieures,  le Théâtre régional d’Oran a maintenu la représentation à l’affiche pour le plus grand plaisir des amateurs du quatrième art. A propos du maintien de cette représentation sur la page officielle du «Gosto Théâtre» de Ziani Cherif Ayad, il a été souligné que « la programmation, par les temps qui courent, n’est pas une incongruité».

En expliquant que «l’artiste ne saurait demeurer à l’écart de son peuple et des changements que connaît son pays ».

Ainsi «l’homme de théâtre – l’artiste de façon générale – est bel et bien embarqué dans le navire de l’histoire, impliqué dans les mutations sociales, à l’écoute des bruissements et des cris de la société ». Les organisateurs ajoutent dans leurs arguments :

«Nous sommes tous concernés par le répertoire universel, que ce dernier contient nos propres questionnements, qu’il se prête à d’autres formes d’expression esthétique». Dès lors, la pièce devient intéressante dans le contexte actuel «parce qu’elle porte en elle une page de critique sociale, qu’elle parle des relations entre maître et valet, de la situation des femmes, mais aussi parce qu’elle revendique, notamment pour les plus démunis, le droit au bonheur, à l’amour, à la joie de vivre… au rire». Par conséquent, le rire et l’humour revêtent une dimension sociale afin de «rire de soi, de sa condition.

Pour ne pas baisser les bras, dire non à l’abattement. A la violence. Rire comme un étendard au vent. Pour clamer l’envie de vivre debout. De quitter la marge de l’histoire, de faire un appel du pied à l’esprit critique». Il est, également, rappelé dans le texte que le regretté Abdelkader Alloula avait bien compris l’importance de cette pièce en la mettant en scène en 1993, année de la commémoration du bicentenaire du dramaturge italien.

C’est dans cet esprit que la version actuelle, revisitée en fonction d’un parti-pris esthétique, «consacré au devoir de mémoire et se veut une contribution au renouveau du théâtre, et un divertissement qui a un sens. Rire, sans pour autant renoncer à réfléchir».

C’est dans cet  esprit que le grand public et les amateurs de théâtre ont été conviés à découvrir «cet autre Arlequin, si proche et si différent des précédentes versions, programmés aussi les 20 et 21 mars à 18h et le 22 mars à 16h  au Théâtre national  algérien.