Gaspillages et hausse des prix

Gaspillages et hausse des prix

Des voix s’élèvent pour dénoncer la hausse des prix des fruits et légumes. Logiquement cela a un rapport avec le pouvoir d’achat. Logiquement aussi, lorsqu’on a un pouvoir d’achat limité, on regarde aux dépenses. Or, cette logique ne semble pas avoir de place chez nous. En effet, comment peut-on expliquer qu’après s’être époumoné contre la «vie chère», on jette le plus normalement du monde sa poubelle pleine de pain.

On vient d’apprendre que l’entreprise «Extranet»-l’une des deux entreprises spécialisées dans la collecte des déchets dans la wilaya d’Alger- a récupéré durant l’année 2016 pas moins de 40.000 tonnes de pain dans nos poubelles. Sachant que le poids d’une baguette est de 200 gr, on vous laisse trouver le nombre de baguettes ainsi jetées. On est dans l’ordre des millions, voire des dizaines de millions de baguettes de pain gaspillées chaque année. Et ceci pour la seule wilaya d’Alger. On peut continuer l’exercice et multiplier par 48 (le nombre des wilayas).

En poursuivant la conversion, ce sont des millions de dollars, puisque le blé est importé, que les chats et chiens errants «malaxent» chaque jour que Dieu fait. Et cela dure depuis trop longtemps pour ne pas faire hurler les plus flegmatiques d’entre nous. Dans le même temps nous considérons que la hausse des prix des fruits et légumes est inacceptable. Que notre pouvoir d’achat s’érode. Nous nous plaignons du manque de contrôle des services du commerce. Les associations de consommateurs en tête. Les «commerçants» en politique aussi. Celui qui trouvera une «normalité» dans ce clivage comportemental, aura du mérite.

Un clivage où le gaspillage du pain est tombé dans une banalisation coupable alors que le moindre centime de plus à débourser au marché prend des allures de catastrophe. Et personne pour nous aider à remettre en ordre notre façon de penser. Aucun programme de sensibilisation digne de ce nom n’a été constaté. Ni le gouvernement ni les partis politiques ni la société civile ni les mosquées, personne n’accorde d’intérêt particulier à ce grave gaspillage de pain. Si ce fléau persiste cela veut au moins dire que le pouvoir d’achat n’est pas si érodé que certains voudraient le faire croire. Alors, pourquoi faire semblant d’être écorché vif quand la tomate ou la courgette prennent de la «hauteur»?

Malheureusement, il n’y a pas que le pain qui est gaspillé. Il y a l’eau. Il y a l’électricité, le gaz. Tout le monde garde le silence et fait semblant de regarder ailleurs. Comme pour mieux détourner l’attention, nous sommes tous devenus des «sentinelles» de la salade et des navets. Peut-on demander aux commerçants de se corriger quand on n’est pas soi-même exemplaire? Il est question, actuellement, de rationalisation des dépenses. Et le gaspillage, c’est quoi?