Benghebrit face aux « fauves »

Benghebrit face aux « fauves »

En acceptant la responsabilité du secteur de l’éducation, Nouria Benghebrit savait pertinemment et avant même son installation, ce qui l’attendait. Elle ne tenait pas à ce que le titre de «ministre» l’honore, mais tient, elle, à l’honorer en respectant ses engagements et en réalisant ses objectifs consistant à jeter les bases d’une école moderne et performante.

Trop de grève, tue la grève. Et c’est exactement ce qui est arrivé avec le Conseil national autonome du personnel enseignant du secteur ternaire de l’éducation (Cnapeste) qui a opté pour un bras de force avec la ministre, Nouria Benghebrit, en se déclarant en grève illimitée depuis fin janvier dernier. Le Cnapeste, qui s’est lui-même piégé avec son jusqu’au-boutisme, a mis en péril les 19 000 postes d’emplois de ses adhérents dont une majorité a fini par se rendre compte qu’elle avait été leurrée par le syndicat dont la démarche déclarée illégale par la justice, n’avait pas respecté les procédures préalables au déclenchement d’une grève. Des enseignants et par centaines, ont décidé de rejoindre le chemin de l’école. Les autres ont reçu, tout au long de la semaine dernière, leur radiation de la Fonction publique. Combien d’enseignants ont été radiés? Combien ont repris les enseignements?

Les chiffres, non rendu publics pour le moment, sont peut-être importants mais restent d’une importance moindre par rapport à l’annonce même du repêchage de l’année scolaire pour des milliers d’élèves. L’avenir des enfants vient d’être sauvé in extremis et cela grâce à un travail acharné et la grande persévérance de la ministre de l’Education. Nouria Benghebrit, qui a choisi la légalité, ne s’est pas seulement opposée à une grève reconnue «hors la loi» par la justice qui, faut-il le rappeler, prononce ses verdicts au nom du peuple, mais elle a également accompli, dans le respect des procédures de la Fonction publique, ce qui peut être appelé de «sale» besogne en validant les décisions de radiation des enseignants.

Et cette décision de licenciement, faut-il encore l’appuyer, est loin de constituer des représailles ou une quelconque entrave aux libertés syndicales et au droit à la grève. Il ne s’agit là que d’une procédure purement légale engagée par les services du ministère de l’Education. Ces derniers et une fois la grève déclarée illégale, ont adressé des mises en demeure pour exiger des justificatifs aux enseignants absents de leurs postes de travail. Après deux mises en demeure, l’administration était en droit de procéder à la révocation sans préavis ni indemnisation. Cependant, la validation des radiations est loin d’offrir le bon rôle à la ministre de l’Education.

Pis encore, elle risque même de ternir son image vis-à-vis d’une partie de l’opinion publique. Mais, en acceptant la responsabilité du secteur de l’Education, Nouria Benghebrit savait pertinemment et avant même son installation, ce qui l’attendait. Elle ne tenait pas à ce que le titre de «ministre» l’honore, mais tient, elle, à l’honorer en respectant ses engagements et en réalisant ses objectifs consistant à jeter les bases d’une école moderne et performante. Nouria Benghebrit a été la cible de multiples tentatives de déstabilisation, menées par des islamo-conservateurs depuis sa nomination à la tête de l’éducation et avant même son installation.

Il lui a été reproché, dans un premier temps, sa supposée origine «juive». Elle a, ensuite, été attaquée pour avoir évoqué l’idée d’introduire l’arabe dialectal dans l’enseignement. Elle a été accusée d’appliquer un «programme de destruction de l’école algérienne, imposé par la France». Les islamo-conservateurs n’ont pas attendu, pour ne pas dire ils ont accouru, pour faire signer une pétition aux députés exigeant le départ de la ministre après le scandale des fuites des sujets du baccalauréat 2016. Les attaques contre Nouria Benghebrit ont été nombreuses et la ministre savait pertinemment que les islamo-conservateurs continuent de guetter son moindre faux-pas. Elle avance sur un chemin miné, mais n’a pas l’intention de reculer. Ni d’abdiquer.

La ministre a été considérée par les obscurantistes, comme une menace réelle pour les valeurs du pays. Elle est devenue, depuis, la femme à abattre. Malgré cela, la ministre, toujours méthodique, pertinente et inflexible sur ses positions, reste décidée à mener à bien la mission qui lui a été confiée à la tête du secteur de l’éducation. Cependant, aujourd’hui et avec la pression engendrée par le Cnapeste à laquelle s’ajoute celle de l’intersyndicale de l’éducation, qui cherche à profiter d’une situation trouble pour faire passer sa plate-forme de revendications, Nouria Benghebrit se retrouve seule dans la cage aux fauves.

Convaincue que la fuite en avant ne sert pas l’école algérienne, la ministre est décidée à affronter la férocité. Mais dans ce combat qui doit être celui de toute une nation, Benghebrit ne doit pas être seule. Les hautes autorités de l’Etat, les partis politiques, la société civile, les parents d’élèves et tout le peuple ont le devoir de rester à ses côtés et d’entrer dans la cage pour la sauver. Préserver la ministre revient à défendre sa mission. Une mission «historique» à plus d’un titre, car elle permettra d’engendrer «l’Algérie nouvelle».