Séjour des émigrés dans leur pays d’origine : Se ressourcer et faire des affaires

Séjour des émigrés dans leur pays d’origine : Se ressourcer et faire des affaires

20-07-10-elkhabar.jpgJoindre l’utile à l’agréable est la devise des nombreux émigrés qui retrouvent à chaque période estivale leur pays natal. Leur séjour leur permet, certes, de se ressourcer mais également de faire de bonnes affaires qui les aident à amortir les dépenses liées au voyage.

Le mois d’août pointe à peine son nez que l’afflux des émigrés au pays natal via les ports et les aéroports commence. Certains arrivent en famille, d’autres en solo. Parfois, quand les moyens financiers ne le permettent pas, seuls les enfants sont accueillis par les proches parents.

Il faut dire que la grande majorité des émigrés n’ont aucun problème d’hébergement en Algérie, ceci en dépit du fait que rares sont les membres de la communauté étrangère qui sont propriétaires d’un logement dans leur pays d’origine, exception faite pour les familles originaires de Kabylie qui peuvent s’offrir le luxe de bâtir de luxueuses villas sur des terrains hérités de leurs aïeux.

Les liens familiaux que l’éloignement n’a pas réussi à couper ou que l’on tente de préserver pour moult raisons, se renouent de plus belle pendant la période estivale. Point de problème d’accueil, les proches sont là et n’ont jamais fermé la porte au nez de leurs invités qui débarquent pratiquement chaque année avec un petit cadeau ou une invitation pour un séjour là-bas.

Le renvoi de l’ascenseur s’avère assez souvent difficile en raison des contraintes liées à la délivrance des visas. Mais générosité oblige, on se ruine pour que nos proches émigrés aient droit à de bonnes et inoubliables vacances. Une façon comme une autre de leur inculquer les valeurs de ceux qui sont restés ici.

Joindre l’utile à l’agréable

Il est de notoriété publique qu’au bout de tout voyage, il y a forcément une enveloppe financière faramineuse. Les dépenses varient d’un pays à l’autre. Parfois, quand on cède à la tentation de découvrir un grand pays ou une destination touristique de renommée, on se contente de faire du tourisme et de ne rapporter qu’un petit souvenir.

C’est sans regret car le voyage en lui-même est un cadeau inespéré. Ce n’est, cependant, pas le cas pour ceux qui choisissent l’Algérie pour passer quelques semaines de vacances, notamment les membres de la communauté nationale établie à l’étranger.

Ces derniers joignent l’utile à l’agréable, c’est-à-dire qu’ils viennent au pays pour se ressourcer et faire des affaires. Il y a quelques années, les familles algériennes attendaient la venue au pays du parent émigré pour avoir droit à des cadeaux et des tenues vestimentaires introuvables en Algérie.

Aujourd’hui, les temps ont changé, notamment pour ceux qui rentrent, l’espace de quelques mois de vacances, de France et d’Espagne. Finies les valises et autres cabas bourrés de cadeaux et autres qui faisaient grand plaisir aux proches qui ne manquaient pas de crier sur tous les toits que tel ou tel article “vient directement de là-bas.” Les emplettes qui se faisaient jadis dans les marchés d’outre-mer pour atterrir au pays se font de plus en plus rares, pour ne pas dire ne se font plus.

On se contente d’un petit quelque chose pour chaque membre de la famille et on économise ses euros pour que les fameuses emplettes fassent le voyage inverse. “La vie est trop chère là-bas. Chaque euro, voire chaque centime, compte. Tout se paie là-bas” se justifient les invités d’outre-mer.

Plages, restos et grand magasins

Qu’ils arrivent en famille ou en groupes d’amis et parfois en solo, les émigrés planifient leurs vacances comme ils gèrent leur budget. Pas question de perdre une seule journée. Le programme des sorties est confectionné avec les proches qui joueront les guides et les accompagnateurs dès l’arrivée au pays.

Profiter pleinement du beau soleil de la Méditerranée dont ils sont privés mais aussi du vaste littoral est une priorité. Certains dont le séjour est plus long vont à la découverte des musées et autres sites historiques et touristiques du pays. Mais quel que soit le programme établi, au bout du séjour, il y a les bonnes affaires.

Les prix pratiqués chez nous que de nombreux ménages trouvent très excessifs, ce qui est vrai d’ailleurs, sont très abordables pour les émigrés qui en débarquant à Alger gardent toujours une somme conséquente pour faire du shopping et rapporter des souvenirs d’Algérie aux amis, notamment ceux de nationalité étrangère.

L’ouverture de grands magasins des marques de renom en Algérie n’a fait qu’augmenter la fièvre des emplettes qui s’est emparée ces dernières années des membres de la communauté algérienne à l’étranger. Si auparavant on se contentait de rapporter du pays des produits introuvables à l’étranger ou dont la qualité n’est pas aussi bonne que celle du bled, aujourd’hui on rapporte de tout et surtout des articles de marque, intouchables à l’étranger.

“Je viens pratiquement deux fois par an chez la famille à El -Biar. J’avoue que pour 1 000 euros, je me permets des articles de marque dont je ne peux même pas rêver là-bas”, témoigne un jeune émigré rencontré au magasin Adidas.

Et d’ajouter : “Vous savez, tout est donné ici. Quand je fais les boutiques, je ne sais plus quoi prendre. Je me contente du nécessaire tels des jeans de très bonne qualité que les amis de cousins algérois me bradent et des baskets de marque que je me procure depuis plus de cinq ans ici.”

La sœur du jeune émigré regrette que la boutique Etam de la rue Didouche-Mourad ait fermé. “J’étais déçue car l’an dernier, j’ai pris des articles que je me contentais de contempler au magasin à Paris.

Ma cousine trouvait trop chère la petite robe à 4 500 DA mais pour moi, c’était offert. Je n’aurais jamais pu m’offrir un article de marque avec l’équivalent du prix. Franchement, je fais de très bonnes affaires quand je viens. Le plus beau, c’est que l’on peut tout s’offrir, de la marque aux produits d’artisanat à des bijoux en argent…”

Une autre dame croisée avec sa fille et leurs “guides” au magasin de vêtements Actua de Didouche-Mourad avoue qu’elle a retardé son retour de trois jours pour profiter des soldes de cette marque française. “Ce n’est pas une très grande marque mais ils font dans la qualité et parfois l’original.” Cette dame devait repartir il y a quelques jours mais “quand on a su que les soldes commençaient le 21 juillet, nous avons décidé de rester et d’en profiter”.

Ce n’est pas le cas pour cette assistante maternelle dans la région parisienne : “Je rate les soldes car mon vol est prévu demain matin et je reprends le boulot le lendemain, sinon j’aurais prolongé mon séjour. Mes enfants restent mais ils ne peuvent rien me rapporter. Je suis bien ronde et ce n’est pas facile de trouver ma taille”, lance la dame avec un grand sourire. Et d’ajouter : “Les vêtements de grande taille ne sont pas donnés.

C’est excessivement cher en France alors je profite quand je viens pour changer ma garde-robe.” Sa fille enchaîne en lui rappelant qu’elle n’est pas la seule à faire de bonnes affaires en Algérie : “Tu oublies que Karim collectionne des montres Swatch qu’il ne peut se procurer qu’ici.”

En fait, à chacun son péché mignon et celui de Lynda et sa maman rencontrées au centre commercial El Khalidj du Golf est la chaussure et le sac qui ne va pas forcément avec.

“Chaque année, je rapporte avec moi une moyenne de six sacs et chaussures. Je fais le tour des magasins spécialisés, notamment ceux du centre commercial d’El Biar pour céder à tous mes caprices”, raconte Lynda.

Toute contente, sa maman nous apprend qu’elle a même pu s’offrir des sacs de marque qui font détourner le regard à Barcelone : “Une collègue n’en revenait pas quand je lui ai dit que mon  beau sac Etam vient d’une boutique algérienne et pour seulement 5 000 DA. Tu m’en rapporteras un à ton prochain voyage m’a-t-elle demandé.”

Rapporter les bons ingrédients pour une bonne chorba

Certains vacanciers venus d’Espagne cette année avouent que l’année a été des plus dures avec la crise qui secoue le pays. Installée à Barcelone depuis près de vingt ans, cette dame avoue que sa famille n’a jamais souffert autant que cette année. “D’habitude, nous venons en famille pour une vingtaine de jours de vacances à Alger et en Kabylie.

Mais cette année, nous n’avons pu payer que deux billets. J’ai ramené ma fille et laissé les trois garçons avec leur père.” À vrai dire, la jeune fille a bien mérité son voyage car ces deux derniers mois, elle n’a cessé de faire de petits boulots pour remplir sa tirelire. “J’avoue que j’ai du mal à repartir pour affronter une fois de plus les difficultés et contraintes quotidiennes.

Cette fois-ci d’ailleurs, je me contente de rapporter tout ce qu’il faut pour le mois de Ramadhan.” En effet, de nombreuses ménagères profitent de leur séjour en Algérie à l’approche du mois de carême pour s’approvisionner. “La qualité et le goût des produits disponibles à l’étranger ne valent pas ceux de nos marchés”, soutient une ménagère venue de Barcelone.

Et d’ajouter : “Je compte faire une petite fête pour les amis à l’occasion de la circoncision de mon fils, le 27e jour de Ramadhan. J’aurai besoin de pas mal de choses pour des gâteaux algérois et la tamina et les prix au niveau des marchés sont très abordables.” Pour être sûre de ne rien oublier, la dame trimbale sa longue liste d’achats de marché en marché. Car pour elle, ce qui est bien aussi à Alger c’est la multiplication des marchés et le rapprochement des quartiers : “J’ai pratiquement fait tous les marchés de la capitale.

C’est la même chose chaque année. Mes enfants viennent pour faire du tourisme mais moi j’en profite pour faire mes emplettes à moindre prix.” Tant mieux car ici certains ménages ne peuvent se permettre ni de faire du tourisme dans leur propre pays ni de faire des emplettes à moindre prix. Surtout pas à l’approche du mois de carême.

Malika Ben