Halilodzic : «Ce que les Algériens ont subi au Caire est inadmissible, la FIFA doit sévir !»

Halilodzic : «Ce que les Algériens ont subi au Caire est inadmissible, la FIFA doit sévir !»

article-9504-Halilodzic-25112009-2.jpg«J’ai commencé à superviser l’Algérie en prévision d’un face-à-face en quart de finale de la CAN.»

Vahid Halilodzic, le sélectionneur national de la Côte d’ivoire estime que l’Algérie figure parmi les prétendants potentiels pour décrocher cette CAN 2010, comme il l’avait déjà déclaré sur l’antenne d’Al Jazeera Sports. Sollicité hier après- midi par le buteur, le patron des Eléphants a accepté de nous livrer ses impressions sur l’Algérie et la Côte d’ivoire. Appréciez.

Votre déclaration sur Al Jazzera Sports vous a rendu très populaire en Algérie…

(Rire). Là, je ne sais pas, c’est à vous de me le dire. En tout cas, j’ai toujours eu d’excellentes relations avec les Algériens, et ce depuis toujours. Je tiens d’ailleurs à e vous remercier d’avoir pensé à moi. C’est un honneur de m’adresser aux algériens.

Vous avez cité l’Algérie parmi les favoris pour remporter cette CAN. C’est un beau compliment !

Ce n’est pas un compliment, mais la pure vérité. L’Algérie possède une très bonne équipe qui a réussi à battre une équipe d’Egypte, double champion d’Afrique en titre et dans des conditions extrêmement difficiles. Je le redis encore une fois, l’Algérie figure parmi les favoris de cette CAN, c’est incontestable.

Pourquoi l’Algérie?

Je pense que l’Algérie a prouvé lors de ses éliminatoires, qu’elle possède une équipe très soudée. La preuve, c’est qu’elle a occupé la première place de son groupe depuis la première journée. Ce n’était pas facile de réaliser une telle performance. En plus, l’Algérie a arraché sa qualification au Soudan, lors du match d’appui dans des conditions assez exceptionnelles. Les Algériens ont un moral d’acier.

Après avoir vécu un véritable enfer en Egypte où le bus de la sélection Algérienne fût saccagé, et les joueurs agressés, ces derniers ont défié tout le monde, alors qu’on croyait tous que l’Algérie allait se faire éliminer. Mais cela a influé positivement sur le moral des joueurs. Autrement dit, une équipe qui se qualifie face au champion d’Afrique en titre, et dans ces conditions, a toutes les chances de remporter la Coupe d’Afrique des Nations. Il faut que les gens ne minimisent pas cette équipe d’Algérie, après ce qu’elle a montré face à l’Egypte. Pour moi, elle est parmi les prétendants potentiels pour le sacre final.

Est- ce que vous avez été surpris par la qualification de l’Algérie au Mondial sud- africain?

Oui, j’ai été très surpris par la qualification de l’Algérie en coupe du monde. Ce n’est pas parce que j’ai douté des qualités des Algériens, non. Ce n’est pas à cause de ça, mais c’est à cause des graves incidents qui ont émaillé le match retour au Cairo Stadium. Là bas, les Algériens ont vécu un véritable enfer. Ils ont été agressés et intimidés. Mais ils ont su se remotiver, surtout en ce qui concerne la motivation sportive.

Ils ont relevé le défi. Franchement, les joueurs Algériens sont à féliciter vivement. Moi, personnellement, après avoir vu les images terribles à la télévision, j’attendais à voir l’Egypte arracher sa qualification haut la main, mais les Algériens ont su créer la surprise face à cette adversité. Compte tenu de ce qui s’est passé au Caire, l’Algérie mérite amplement sa qualification. En éliminant l’Egypte, double champion d’Afrique, l’Algérie a le droit de rêver à devenir championne aussi.

Comment les Ivoiriens qui ont subi les mêmes intimidations lors de la CAN 2006 au Caire, ont-ils vécu ces graves incidents qui ont émaillé le match Egypte- Algérie ?

Oui, ici en Côte d’Ivoire, tout le monde a vu ces images à la télévision et ils ont tous repensé à ce qu’ils ont vécu au Caire en 2006. C’est affreux, affreux ! L’accueil qui a été réservé à l’Algérie au Caire a été commenté par tous les joueurs de la sélection, qui étaient tous surpris de ce qui s’est passé. Bon, mais nous étions en train de préparer notre match face à la Guinée, c’est pour cela qu’on n’avait pas donné beaucoup d’importance à ces incidents malgré leur gravité. On ne voulait pas perturber l’équipe. Mais je peux vous assurer que les joueurs de la Côte d’Ivoire étaient tous choqués et déçus pour les Algériens après le 2 à 0 du Caire. Ils savaient parfaitement ce que les Algériens enduraient en Egypte.

Peut- on avoir votre avis personnel sur ce qui s’est passé?

Je pense que la FIFA doit prendre les mesures disciplinaires qui s’imposent. De tels comportements sont inadmissibles, surtout que ça s’est produit entre l’Algérie et l’Egypte. Ce sont deux pays frères qui ont d’excellentes relations à tous les niveaux. Il ne faut pas permettre et encourager de tels comportements qui ne feront que séparer les peuples.

Que pensez-vous du tirage au sort de la CAN. Tout d’abord avec le groupe B celui de la Côte d’Ivoire?

Je pense que notre groupe est le plus difficile de cette CAN. Il renferme le Ghana, le Togo et le Burkina Faso. Ce ne sera pas facile du tout, ni pour nous, ni pour une autre équipe.

Et pour le groupe A, celui de l’Algérie?

Ce groupe renferme l’Algérie, l’Angola, le Mali et le Malawi. Je pense qu’il est moins difficile que les autres. Le Mali est une équipe qui possède de bons joueurs, qui évoluent au sein des grands clubs Européens. Il y aura aussi l’Angola, le pays organisateur, qui aura l’avantage du public et du terrain. Je pense que pour ce groupe la qualification au second tour va se jouer entre l’Algérie, le Mali et l’Angola.

Quels sont les chances de l’Algérie dans ce groupe?

Je pense que l’Algérie possède des chances pour passer au second tour. Comme je vous ai dit, l’Algérie a éliminé l’Egypte, qui a remporté les deux dernières CAN. C’est donc une équipe à prendre très au sérieux et qui a toutes ses chances dans cette épreuve.

Vous risquez d’affronter l’Algérie à partir des quarts de finales…

Oui, c’est vrai. Il y a des chances qu’on soit opposés à l’Algérie à partir des quarts de finales. A ce moment là, la première des choses que je ferai, c’est de mettre en garde mes joueurs contre cette équipe très dangereuse qui a éliminé le double champion d’Afrique. Mais d’ici là, on verra. C’est après le premier tour qu’on pourra faire une conclusion générale sur les équipes qui vont jouer les premiers rôles dans ce tournoi.

Vous avez eu une longue carrière en tant que joueur puis comme entraîneur. Avez- vous côtoyé des Algériens?

Oui, j’ai côtoyé beaucoup d’algériens. En France par exemple, j’avais au PSG, un collègue qui s’appelait Hakim Chalabi. C’était un médecin. En Arabie Saoudite, j’avais aussi un membre du staff technique, au sein de l’équipe d’Al Ittihad de Djedda.

Kaoua Abdennour?

Oui, c’est kaoua. C’est un très bon ami à moi. D’ailleurs, il m’appelait depuis une dizaine de jours, il m’a même fait savoir qu’il est rentré en Algérie. Je profite de cette occasion pour présenter mes sincères salutations sportives à lui, et à toute sa famille. C’est quelqu’un avec qui je m’entendais à merveille.

A votre avis, quels sont les joueurs algériens à surveiller de plus près ?

Il y a deux joueurs qui sont pétris de talents : Rafik Saifi et Karim Ziani. Saifi est un joueur très technicien qui peut faire la différence à lui seul et à n’importe quel moment. Il faudra le surveiller de près. Ziani aussi, la preuve, c’est qu’il est parti en Allemagne à Wolfsburg. Ce sont les deux joueurs les plus dangereux de la sélection algérienne. En tout cas, j’ai confié à mes assistants de me procurer des cassettes vidéos sur les matchs de l’Algérie pour bien superviser votre équipe, et avoir une idée sur ses points forts et ses points faibles. Comme ça, si le destin nous amène à une rencontre en quart de finale de la CAN, je saurais comment vous contrer (rires).

La Coupe du Monde va commencer dans huit mois, quelles chances accordez-vous aux équipes africaines ?

J’espère que les équipes africaines vont surprendre cette fois- ci. Il y a six équipes et au moins une ou deux d’entre elles va parvenir au moins en quarts de finale. Je pense que c’est le moment de faire quelque chose, de frapper un grand coup. Ce serait vraiment bien de voir une équipe africaine aller un peu plus loin que les années passées. Il y a des joueurs et des équipes qui peuvent bousculer la hiérarchie.

Et pour la Côte d’Ivoire?

Pour nous en Côte d’ivoire, on ne pense pas encore à la Coupe du Monde. Notre premier objectif est de jouer les premiers rôles lors de cette CAN qui va avoir lieu en Angola. On va jouer le tout pour le tout, dans le but de remporter le trophée. On veut aller jusqu’au bout. En Coupe du Monde, si on arrive à passer le premier tour, cela nous conviendra parfaitement.

Selon vous, quelle est l’équipe africaine qui est capable d’offrir au contient sa première Coupe du Monde de l’histoire ?

Sincèrement, je pense qu’aucune équipe ne peut offrir au contient africain la Coupe du Monde. On ne peut pas gagner comme ça la Coupe du Monde. Il faut beaucoup plus d’expérience encore.

Vous avez pourtant pu tenir en échec la grande équipe de l’Allemagne…

On a fait un super match contre les Allemands. On était amoindris pourtant de Baki Koné et de notre gardien de but Barry Kopa. On a même failli gagner mais les Allemands ont réussi à égaliser à la toute dernière minute. La Côte d’ivoire est une redoutable équipe, et les joueurs sont très ambitieux.

Vous avez dominé outrageusement votre groupe lors des éliminatoires. Peut-on conclure que la c’est la Côte d’Ivoire qui est trop forte ou alors vos adversaires qui sont faibles ?

Je pense que la Côte d’ivoire a été nettement au dessus du lot. C’est incontestable. On a dominé notre groupe, malgré la présence de très bonnes équipes comme le Burkina Faso ou la Guinée. On possède l’une des meilleures équipes du continent. La preuve, c’est qu’on a réussi à tenir en échec l’Allemagne chez elle. Notre réussite est due aux respects qu’on a envers nos adversaires, quelle que soit leur histoire, quel que soit leur calibre. On n’a jamais sous- estimé nos adversaires. C’est certainement cela qui nous permet de jouer avec la même détermination et la même volonté de gagner.

L’Algérie ne vous a pas laissé que de bons souvenirs en tant qu’entraîneur, puisque vous l’avez quitté la dernière fois avec une méchante défaite, non ?

Ah, oui ! ça c’est vrai. J’en garde un mauvais souvenir, il n’y a aucun doute à cela. C’était lorsque j’étais à l’Ittihad de Djedda. On avait perdu quatre buts à un chez vous à Sétif. C’était dans des conditions très difficiles. En face, il y avait une très bonne équipe de Sétif, mais aussi il y avait le handicap de la pelouse, puisque c’était la première fois que mes joueurs évoluaient sur une pelouse synthétique.

Un dernier mot pour le peuple Algérien…

Je suis vraiment content d’avoir vu le peuple algérien défiler à travers les villes du pays après la qualification au mondial. Le peuple algérien aime beaucoup le football, on sent la passion qui l’anime à chaque match des Fennecs. Je profite de cette occasion pour féliciter tous les algériens pour cette belle aventure qui les a menés en Afrique du Sud. Je salue par le biais de votre journal tous mes amis algériens.

Entretien réalisé par Hamza Rahmouni